Cela fait maintenant deux ans que le Soudan est plongé dans un conflit aussi brutal qu’insoutenable. Ce qui avait commencé à Khartoum s’est rapidement propagé à l’ensemble du pays, déclenchant l’une des plus graves crises humanitaires au monde. Des millions de personnes ont été contraintes de fuir leurs foyers. Najah Almugahed, conseillère en inclusion de genre et protection pour Islamic Relief, témoigne de ce qu’elle a vécu lors de sa dernière mission au Soudan.
Ce que j’ai vu en février 2025 m’a bouleversée. Yéménite, j’ai grandi au cœur des crises. Elles ont façonné ma vie. Mais ce que j’ai découvert au Soudan dépasse tout ce que j’ai connu. La vie des gens y a littéralement basculé.
Près de 13 millions de personnes ont été déplacées de force – soit près d’un cinquième de la population soudanaise. Certains parlent même de la plus grande crise de déplacement interne au monde.
Et ce que l’on voit n’est que la surface. Dans l’État de Gedaref, au sud-ouest du pays, nous avons visité d’immenses camps accueillant ceux qui ont fui Khartoum et d’autres régions en guerre. Ces camps ne peuvent héberger que moins de 20 % des déplacés. Les autres dépendent du soutien – souvent déjà fragile – de leurs proches.
Pour vous donner une idée, jusqu’à cinq familles – soit environ 25 personnes, parents, enfants, grands-parents, parfois même arrière-petits-enfants – vivent entassées dans une seule maison depuis près de deux ans.
Aujourd’hui, les deux tiers de la population soudanaise ont besoin d’une aide humanitaire : abris, nourriture, eau, soins médicaux… Les besoins en protection sont immenses, mais difficiles à quantifier.
Un chiffre parle pourtant de lui-même : les cas de violences basées sur le genre ont explosé. Le cluster Protection du Soudan fait état d’une augmentation de 400 % des services spécialisés, notamment en soutien psychologique, gestion de cas et kits d’urgence. Une situation terrifiante, en particulier pour les femmes.